lundi 3 octobre 2016

--- PROJET DOUBLE ---

PROJET DOUBLE – texte conçu par Magda Moraczewska & kOLya San pour accompagner le travail présenté (sous forme de bloc-notes à l'exposition) :

Plastique kafkaïenne

C’est en se réveillant un matin après des rêves agités que Magda Moraczewska et kOLya San envisagèrent ce projet. Le rêve d’un espace, d’une exposition, et les mots viennent s’articuler sur le dos d’un cafard. Les symboles se croisent, l’atmosphère est sombre, fantastique cauchemar ou simple allégorie que chacun pourra interpréter. Là deux êtres différents content leur solitude, leur espoir, désespoir, leur fièvre ou leur tristesse, tentent d’exprimer le sens, le double, comme la confirmation du rêve, dans des zones d’ombres et de lumières.

Projection introspective

Un cri commun, existentiel comme celui de Munch, déchirant le ciel, traversé par des langues de feu. Ambigu comme la Méduse de Caravage, rapport intime au monstrueux de l’existence, c’est aussi un bouclier. Un cri de stupeur qui n’a de cesse de résonner. Se soulage en expulsant des images, des mots, une émotion brute. Le cri, c’est aussi une ouverture béante qui permet de regarder à l’intérieur. Projection du vide, de la peur qui s’incarne, forme transparente. Des états de conscience qui, tour à tour se troublent, se représentent.

Narcisse dans l’écho

C’est bien moi que je vois dans le reflet. L’image m’embrasse, me consume, JE disparaît entre mes lèvres, le mouvement est subtil. L’objet du désir se métamorphose sur la toile. Implorant du regard l’écho, la profondeur du hors champ, celle qui te fait fuir, revenir. Reste, observe chaque détails, ceux-là mêmes racontent l’histoire, une histoire d’amour impossible, abîme de l’inaccessible, les contours de sa souffrance.
kOLya San présente des photographies, des autoportraits habités aux formats variés. Son travail est une étude, un prolongement, une réflexion, qui pourrait être légendée par les propos de Francis Bacon dans un entretien avec David Sylvester en 1976 : « Je déteste mon propre visage, mais je continue de le peindre du fait seulement que je n’ai pas d’autres gens à peindre. »

Vision double et poudre de marbre

Magda Moraczewska présente des toiles, larges, amples, souvent réunies par deux ou trois avec un même motif qui se poursuit. Elle travaille sur le double depuis un certain temps. Double comme écho mais surtout comme celui qui fait écho – dont la réponse prouve son existence propre, dont la réponse interpelle et fait avancer les deux. Sa double vision, un défaut physique particulier lui a inspiré cette thématique plus universelle. Des personnages dédoublés sur la toile, dans ses dessins ou gravures, sont des écorchés eux aussi. Leur peau est rugueuse, leurs mouvements saccadés et sans grâce. La matière épaisse et granuleuse de la poudre de marbre, l’aspect sableux de la cendre, des noeuds et du tissu en lambeaux, se lisent dans la clarté des glacis aériens et font un tout dansant. Toute cette épaisseur de matière s’oppose en apparence à l’aspect lisse des photos de kOLya San, un dialogue s’établit encore une fois entre ces deux artistes.

Une problématique commune

Voir double, voir le double, le sien, le nôtre. Cette proposition d’exposition a du sens. Il ne s’agit pas de mettre ensemble les travaux de deux artistes, images étrangères, criant leur solitude. Le sens se trouve dans la proximité, dans le répondant. Questions – réponses, questions encore finalement pour avancer sur une problématique commune – celle de L’Echo et celle du Double.
Le projet se joue à plusieurs niveaux, ici à travers la scénographie, les éclairages, l’ergonomie de l’espace. Les travaux se font toujours écho, souvent l’un sera le double de l’autre, ce double imparfait, pas si ressemblant que ça mais avec qui l’on ressent un lien fort.

M&K

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